Lettre ouverte à Monsieur le Premier ministre François BAYROU
Non, le bonus réparation n’est pas une dépense superflue !
Monsieur le Premier Ministre,
Nous avons pris connaissance avec stupeur des propos que vous avez tenus ce mardi 15 avril, qualifiant le bonus réparation comme n’étant « Pas une urgence absolue ». En tant que Président de la Fédération Française de la Cordonnerie Multiservice, je tiens à exprimer notre profond désaccord et à rappeler l’importance de ce dispositif pour notre environnement, notre économie et nos artisans.
Le bonus réparation, loin d’être une dépense superflue, est une réponse concrète aux accords de Paris et s’inscrit pleinement dans l’Agenda 2030 des Nations Unies. Initié en 2020 dans le cadre de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, ce dispositif vise à encourager la réparation plutôt que le remplacement des produits.
Il est financé par une éco-participation des entreprises, conformément au principe de la Responsabilité Élargie du Producteur (REP). Ce principe, basé sur le « pollueur-payeur », oblige les entreprises à contribuer à la gestion des déchets des articles mis sur le marché.
Depuis le 1er janvier 2007, la REP s’applique à de nombreuses filières, dont les produits textiles, le linge de maison, les chaussures, mais aussi les appareils électriques et électroniques, les meubles, et bien d’autres. En soutenant le bonus réparation, nous contribuons directement à plusieurs Objectifs de Développement Durable (ODD), notamment la réduction des inégalités, la promotion d’une consommation et d’une production responsables, et la lutte contre le changement climatique.
Il ne s’agit donc pas d’argent public détourné, mais d’une contribution juste et nécessaire des acteurs économiques responsables, visant à réduire notre empreinte carbone et à promouvoir une économie circulaire.
Depuis le 1er janvier 2007, la loi a instauré la REP pour les produits textiles, linge de maison et chaussures vendus en France. Les entreprises, qu’elles soient fabricants, distributeurs ou importateurs, sont responsables de l’ensemble du cycle de vie de leurs produits, de la conception à la fin de vie. Elles doivent déclarer toutes leurs ventes sur le marché français, peu importe le canal de vente utilisé. Les sociétés étrangères vendant sur le marché français sont également soumises à cette loi.
Le bonus réparation permet de rendre la réparation plus accessible aux consommateurs. En réparant nos chaussures et nos vêtements, nous réduisons notre empreinte carbone et les montagnes de déchets qui s’accumulent chaque année.
Vous-même, Monsieur le Premier ministre, avez récemment dénoncé les dégâts de la fast fashion lors de la présentation par le Secrétariat général à la planification écologique des « Enjeux associés à la production et la consommation de textiles en France ».
Vous avez souligné que cette industrie génère des montagnes de déchets et contribue de manière significative au réchauffement climatique. En effet, selon les chiffres que votre ministère a présentés, la fast fashion est responsable de l’émission de 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre par an, soit plus que les vols internationaux et le transport maritime combinés.
Les cordonniers multiservice, comme tous les artisans de la réparation, sont des acteurs essentiels de nos territoires. Ils contribuent à une économie circulaire où les produits sont utilisés plus longtemps, réparés et recyclés. La réparation permet de garder la valeur en local pour l’économie locale, créant des emplois indélocalisables. Elle constitue une solution concrète à notre production de déchets, que nous ne savons pas gérer sans enfouir ou brûler. En soutenant la réparation, nous favorisons une économie plus résiliente et plus respectueuse de l’environnement.
Face à la fast fashion et à la surconsommation, ils incarnent une alternative durable et responsable. Ces artisans, comme tous les acteurs du Made in France, sont soumis à des charges et taxes importantes, à l’augmentation des matières premières et à une concurrence internationale féroce. Le bonus réparation est une bouffée d’oxygène pour eux, leur permettant de maintenir leur activité et de continuer à offrir un service de qualité de proximité.
Le bonus réparation n’est pas une dépense superflue, mais une nécessité pour notre avenir. C’est une opportunité de consommer de manière plus responsable, de préserver notre environnement et de soutenir notre économie locale. De nombreuses filières sont concernées par ce dispositif, et il est crucial de le soutenir et de le renforcer.
Nous appelons donc solennellement le gouvernement à soutenir et à renforcer ce dispositif essentiel. Ensemble, faisons le choix de la réparation et montrons que nous sommes prêts à agir pour notre planète !
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de ma respectueuse considération.
Jean-Pierre VERNEAU
Président
Fédération Française de la Cordonnerie Multiservice