Histoire de la cordonnerie
La cordonnerie est un métier ancestral qui remonte à la nuit des temps. L’homme a très tôt ressenti le besoin de se protéger les pieds des agressions naturelles du sol, des plantes et de la faune. La chaussure est ainsi devenue un accessoire de luxe dans les milieux dirigeants.
En Égypte, une fresque antique décrit la fabrication d’une sandale en cuir. En Amérique, des archéologues ont mis à jour un site regroupant une quarantaine de sandales toutes différentes, laissant penser qu’il pourrait s’agir de l’ancêtre de nos bottiers actuels.
Dans la Grèce antique, les cordonniers étaient déjà présents. Le général Alcibiade et Iphicrate, fils de cordonnier, ont tous deux exercé l’art de la cordonnerie. Ce dernier a même créé un modèle de chaussures pour ses soldats, les Iphicrates. Le cordonnier corroyeur Simon d’Athènes a, quant à lui, refusé de suivre Périclès à la tête de la république grecque, préférant sa liberté à tous les trésors de la Grèce.
À Rome, l’empereur Caligula a veillé à ce que son armée soit bien chaussée. Les cordonniers romains fabriquaient de superbes mules en cuir brodé et des sandales.
Après une période faste sous l’époque gallo-romaine et jusqu’à Charlemagne, les invasions barbares et les querelles internes dans le royaume ont affaibli l’économie du pays. Les artisans s’approvisionnaient en cuir à l’étranger, le “hongre” venant de Hongrie pour le harnachement du cheval, les chèvres venant de Cordoue en Espagne. Les utilisateurs de ce cuir étaient appelés “cordouannier” ou “cordouennier”.
Les artisans se sont regroupés en corporation dès le 11ème siècle, avec des règles strictes régissant leur travail. Les manquements étaient punis d’emprisonnement, d’amende ou de supplice sur la place publique. En Bretagne, les cordonniers d’une même confrérie étaient tenus de réparer gratuitement les souliers des clients du collègue malade afin de lui assurer un revenu.
Il a fallu attendre le règne d’Henri IV et de son ministre Sully pour que l’industrie du cuir reprenne vie en France. Colbert fit établir un répertoire des métiers et fit entreprendre la rédaction des premiers ouvrages techniques.
Des sociétés secrètes ont vu le jour dans la moitié du 15ème siècle, comme les compagnons cordonniers-bottiers placés sous le rite de Maître Jacques. Les registres ne font état que du surnom des adhérents pour déjouer les persécutions. L’admission de la corporation au sein des Compagnons ne se fera que tardivement vers 1870. Entre temps, les corps compagnonniques constitués et reconnus menaient la guerre aux cordonniers. Ajoutons à cela qu’en 1854, la société mère comptait cinq sociétés compagnonniques des cordonniers bottiers. Aujourd’hui, seule celle des compagnons du devoir subsiste.
Le plus célèbre des compagnons demeure Pierre Capus dit l’Albigeois–l’Ami des Arts qui réalisa des prouesses techniques, ses chef-d’œuvres sont exposés dans le musée du compagnonnage à Tours. Lestage, cordonnier à Bordeaux offrit à Louis XIV une paire de bottes sans couture apparente et sans avoir pris de mesures.
Gnafron est sans nul doute le cordonnier le plus connu de nos petites têtes blondes, je parle bien sur du comparse de notre marionnette lyonnaise Guignol. Alexis Godillot, fournisseur de l’armée laissa son nom pour désigner le brodequin du troupier.
Quelques cordonniers célèbres : l’explorateur René Caillé, le peintre Gaston Chaissac, le chanteur Féodor Ivanovitch Chaliapine, Georges Fox, fondateur de la secte des Quakers, l’Académicien Jean Guehenno, le botaniste Carl von Linné, le prophète Mahomet, le cinéaste Méliès, Hans Sachs, poète immortalisé par l’œuvre de Richard Wagner : les Maîtres chanteurs de Nuremberg, l’écrivain Léon Tolstoï, l’acteur Simon Abkarian.
Le cordonnier en chambre Antoine Simon fut nommé précepteur du Dauphin Louis XVII dans les tours du Temple. L’enfant fut bien traité, Simon offrit Castor, un chien au Petit Capet, puis il fabriqua une volière comprenant 17 perchoirs où le Dauphin éleva des pigeons. Le prince ne fut jamais contraint au port du bonnet rouge révolutionnaire.
Les cordonniers ont leurs Saint Patron, Saint Crépin et Crépinien fêtés le 25 octobre.
Aujourd’hui, la cordonnerie est un métier en constante évolution, alliant savoir-faire traditionnel et techniques modernes. Les cordonniers sont des artisans passionnés, engagés dans la préservation de l’environnement et la promotion d’une économie circulaire.
La Fédération Française de la Cordonnerie Multiservice œuvre pour la valorisation de ce métier d’art et l’accompagnement des professionnels dans leur développement durable.